Dans le crépuscule de ce petit port de pêche, qui confère son nom à la vaste baie s’étirant entre les pointes de Lervily et de Saint-Guénolé, réside un mystère qui ensorcelle les âmes. Les longues étendues de sable qui bordent ces rivages, balayées par les courants impétueux, révèlent souvent les corps sans vie de ceux qui ont trouvé la mort dans les flots impitoyables. Ainsi, dans cet écrin du cap Sizun, les légendes macabres trouvent un sanctuaire privilégié.
Un navire, paré de mille feux, se matérialise à l’heure où le soleil se laisse engloutir par les abysses marins. Étrangement, nul ne semble se trouver à bord de cet esquif fantomatique, mais parfois, à travers les brumes épaisses, résonne le murmure des rames. Il s’agit du Bag Noz, le sinistre navire de la nuit. Ce dernier obéit aux ordres du premier mort de l’année. Si cet infortuné est un vieillard, la manifestation du Bag Noz prédit alors de multiples décès d’enfants au cours des douze mois suivants. Cependant, si le capitaine de ce navire sinistre est un enfant, ce sont les aînés qui seront emportés par la grande Faucheuse.
Telle est la légende qui enflamme les esprits dans ces contrées maritimes. Les villageois chuchotent entre eux, partageant les histoires de leurs ancêtres et redoutant les funestes conséquences des apparitions du Bag Noz. Certains racontent avoir aperçu le navire dans toute sa splendeur, semblant flotter sur les flots en suspendant le temps. D’autres jurent avoir entendu les pleurs déchirants des âmes égarées, des échos provenant d’un passé révolu, tandis que des frissons glacés parcourent leur échine.
La quiétude du port se transforme en une atmosphère ténébrante lorsque le crépuscule s’installe. Les pêcheurs hâtent leur retour aux abris, s’empressant de rentrer chez eux, priant pour que le Bag Noz ne fasse pas une apparition funeste. Les enfants, quant à eux, observent l’horizon, leurs cœurs battant la chamade, cherchant désespérément des signes annonciateurs de l’avenir, alors que les vieillards savent que le sort qui les attend pourrait sceller leur destin.
Ça s’est passé pas loin d’ici…
