Sous les hauteurs de Lastours, dans l’Aude, niché entre les ruines impressionnantes du château de Quertinheux, s’ouvre un gouffre étrange que les anciens appellent « le Trou de la Cité ». Mais ici, tout le monde connaît surtout ce lieu sous un nom bien plus inquiétant : le Trou de la Sorcière, ou encore la Salimonde.

On raconte qu’autrefois, la Salimonde, une sorcière au corps de chèvre, hantait cette grotte. Mi-femme, mi-bête, elle était le mauvais génie des saisons. Chaque année, à la Chandeleur, les habitants de Lastours retenaient leur souffle. Selon ce que faisait la sorcière ce jour-là, leur destin climatique était scellé.

Si la Salimonde se lamentait, de lourds présages s’abattaient sur le pays : un hiver interminable, des récoltes abîmées, et une morosité accrochée aux collines comme un brouillard tenace. Mais parfois, les nuits vibraient d’une étrange mélodie : la sorcière soufflait joyeusement dans une flûte d’os. Ce son, à la fois léger et inquiétant, apportait une promesse d’espoir : un hiver bref, un printemps radieux, et des mois bénis par le soleil.

Une autre tradition, transmise de génération en génération, affirmait un signe encore plus subtil. Si le ciel restait limpide à la Chandeleur, la sorcière pleurait, annonçant qu’il faudrait encore endurer quarante jours de froid. À l’inverse, si les averses noyaient la fête, la Salimonde chantait à pleine voix, heureuse d’annoncer la fin du froid.

Même aujourd’hui, certains vieux de Lastours regardent encore le ciel début février et prêtent l’oreille aux vents venant du Trou de la Sorcière. Qui sait ? Peut-être que dans un souffle humide ou un cri étouffé, la Salimonde murmure encore ses sombres oracles…

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